Cinéma à l'ancienne : Ozu et la bonimenteuse.

29 mars 2013

Cinéma à l'ancienne : Ozu et la bonimenteuse.

Depuis quelques temps, je regarde beaucoup de films muets, et j'ai même décidé de proposer un cours sur ce sujet à ma classe préférée. Nous en sommes venus à discuter des différences entre les films muets en France/USA et au Japon, et après quelques recherches, l'une de mes élèves a découvert que le cinéma muet était resté très longtemps populaire, même après l'apparition des premiers films parlants (à partir de 1927). L'une des raisons en serait la popularité des 弁士, les bonimenteurs japonais.

Une société a été créée en 1952 par un de ces benshi, Matsuda Shunsui, pour contribuer à la restauration et à la diffusion de films muets. Elle organise ainsi chaque mois une projection d'un film muet, le benshi présent sur scène recréant les dialogues et en donnant une voix (différente !) à chaque personnage du film.

La séance à laquelle j'ai assisté proposait un premier moyen-métrage d'une vingtaine de minutes, 弱虫天国　(1930) histoire humoristique d'un jeune homme sensible (i.e: une lavette), en héros local...Visiblement inspiré par les films burlesques américains (ne serait-ce que pour la micro moustache du héros...).

Le deuxième film était de Yasujirô Ozu, 『出来ごころ』(1933) (traduit en français par "Coeur capricieux), l'histoire d'un père et de son fils issus des bas-quartiers.

J'ai l'habitude de regarder les films muets chez moi, seule, en suivant les images et la musique; je me demandais donc si le bonimenteur n'allait pas un peu gâcher mon plaisir en collant des paroles à chaque personne...Il est vrai qu'il y a parfois plus de phrases que de lèvres qui bougent sur l'écran, mais le travail des bonimenteurs est néanmoins remarquable (regarder la bonimenteuse s'animer et mimer pour ainsi dire les expressions de chacun en passant de la voix douce de la jeune vierge effarouchée au ton bourru du mec qui la convoite puis du gamin frondeur est fascinant, on en oublie vite qu'elle est toute seule...).